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Tout droit dans la crise énergétique.

La stratégie «Développement durable 2030» de l’Office fédéral du développement territorial (ARE) ne tient compte ni de la croissance démographique – et de l’augmentation des besoins en énergie qui en découle –, ni de l’abandon progressif de l’énergie nucléaire à moyen terme. L’ARE laisse également ouverte la question de savoir comment le remplacement nécessaire des sources d’énergie fossiles peut être géré de manière réaliste. Le thème de la sécurité d’approvisionnement n’est pas traité avec tout le sérieux nécessaire dans la stratégie «Développement durable 2030», encore en consultation jusqu’au 18 février 2021. Avenergy Suisse considère que la stratégie n’est pas encore mûre et demande sa révision.

À quoi ressemblera l’approvisionnement énergétique de notre pays dans neuf ans? C’est l’une des questions auxquelles la stratégie «Développement durable 2030» de l’Office fédéral du développement territorial (ARE) est censée répondre. Cependant, au lieu d’identifier des solutions ciblées dans le domaine de l’approvisionnement en énergie, l’ARE ignore ce point crucial pour l’économie et la population. Ainsi, la stratégie «Développement durable 2030» entraîne le pays tout droit dans une crise énergétique, car les estimations et les calculs cités dans le document montrent que la Suisse va se retrouver dans un problème massif d’approvisionnement en énergie si elle suit la voie souhaitée.

Cette stratégie est insuffisante, notamment en termes de production et de fourniture d’électricité. L’ARE ne tient pas compte des avertissements de la Commission fédérale de l’électricité ElCom concernant l’imminence d’une pénurie d’électricité (Rapport sur la sécurité de l’approvisionnement en électricité de la Suisse 2020, publié en juillet 2020) ni des préoccupations de l’Office fédéral de la protection de la population concernant une panne générale de courant (Rapport sur les risques du 26 novembre 2020).

Il est généralement admis que l’élimination progressive des combustibles fossiles ne peut être réalisée que par une augmentation correspondante de la disponibilité de l’électricité issue d’une production sans CO2. La Confédération suppose que 37,4 TWh seront disponibles en 2035 à partir de l’hydroélectricité et 11,4 TWh à partir de nouvelles sources renouvelables. En comparaison, la production brute d’électricité en 2019 était de 71 TWh. En outre, la Confédération suppose une diminution de la consommation d’électricité par habitant de 13% par rapport à 2000. La population de la Suisse est estimée à 10 millions d’habitants pour 2030 (2000: 7,3 millions). Cette évolution à elle seule entraînera une demande supplémentaire d’électricité d’environ 20% en 2030 par rapport à 2000, soit environ 80 TWh (bilan énergétique total de la Confédération). Il convient de noter que cette demande n’inclut pas le remplacement des sources d’énergie fossiles.

La stratégie n’aborde même pas le rôle de l’énergie nucléaire. On peut supposer que les centrales nucléaires actuellement en exploitation seront déclassées compte tenu de leur âge actuel – entre 46 et 61 ans d’exploitation. Le fait que l’énergie de base des centrales nucléaires ne peut être remplacée par des énergies renouvelables stochastiques sans mise en œuvre des concepts de stockage complexes correspondants ne doit être mentionné qu’en passant. 

D’une part, l’ARE critique la dépendance de la Suisse vis-à-vis de l’étranger pour son approvisionnement en énergie en rapport avec les énergies nucléaire et fossile. D’autre part, «l’accès aux marchés étrangers ... devrait assurer la stabilité et la résilience du système». Dans ce contexte, il est d’ores et déjà prévisible qu’il n’y aura pas de surproduction d’électricité renouvelable dans les environs immédiats de la Suisse. Au contraire: l’Allemagne est en train de supprimer progressivement l’énergie au charbon, et même la France, un pays nucléaire, envisage de supprimer progressivement l’énergie nucléaire à moyen terme.

Ce qui est totalement incompréhensible, c’est le passage du document stratégique de l’ARE selon lequel les incitations à l’utilisation des combustibles fossiles seront supprimées. Comme on le sait, les énergies fossiles sont lourdement taxées en Suisse. Dans le cas du carburant, les taxes et les droits représentent actuellement près des deux tiers du prix à la consommation. Les recettes des taxes sur les huiles minérales représentent à elles seules cinq à six milliards de francs par an. L’électrification des transports prévue éliminera en grande partie ces ressources financières pour le secteur public. La stratégie n’aborde pas la question de savoir comment compenser le manque à gagner de la taxe sur les huiles minérales. Elle n’est donc pas durable en termes de politique énergétique et de politique financière.

En tant que fournisseur de la plus importante source d’énergie en Suisse, avec une part de quelque 50%, nous sommes préoccupés par la manière unilatérale et contradictoire dont la Confédération traite l’approvisionnement énergétique de notre pays sous la rubrique «durabilité». La stratégie de l’ARE ne rend pas justice au mandat constitutionnel selon lequel la Confédération doit œuvrer pour assurer un approvisionnement énergétique suffisant, sûr et économique (art. 89 LF). Et elle ignore les avertissements de l’ElCom et de l’Office fédéral de la protection civile. Pour ces raisons, Avenergy Suisse considère que la stratégie «Développement durable 2030» est mal conçue et peu utile, et demande sa révision.

12 02 2021

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